29-06-2020 13:51 - Racisme en Mauritanie : Abou Djiby Diop, le miraculé | Récit d’une bavure

Racisme en Mauritanie : Abou Djiby Diop, le miraculé | Récit d’une bavure

IRA-Mauritanie - Assalamou Aleikoum, chers parents et amis !

Je suis Abou Djiby Diop, celui que deux policiers avaient étranglé, au bord de la chaussée, non loin du Commissariat Elmina1, dans la capitale, le 20 juin 2020, peu avant 11 heures du matin.

Mon père s’appelle Djiby Hamady Diop, ressortissant du village de Waly, ma mère – Maimouna Samba M’Bodj, est de Maghama. Je suis né en 1980 à Sebkha, quartier de Nouakchott. J’habite le lotissement Samia, dans la commune d’Elmina et travaille au marché de la plage. Depuis longtemps, j’aide les équipes de pêcheurs à amarrer leurs pirogues.

En contrepartie, je suis payé en nature. Je revends les quelques poissons sur place ou aux mareyeurs. Parfois, je les rapporte chez moi, pour ma consommation propre.

Peu avant 5 heures du matin, je me rends au stationnement dit « Arrêt bus » d’où je dois prendre un taxi, en direction de mon lieu de travail. Je n’avais en poche que 10 ouguiyas, donc pas assez. Aussi, me suis-je résolu à marcher. Sur ma route, deux individus, armés de couteaux m’interceptent et intiment l’ordre de leur donner mon sac à dos. Devant leur agressivité, je me sauve en courant. J’ai pris l’habitude de fuir les problèmes auxquels je ne peux faire face, tout seul. A toutes jambes, je me réfugie derrière un vieil homme qui lisait un Coran, assis, en plein air.

Hélas, les deux malfaiteurs ne tiennent pas compte de sa présence et me poursuivent encore ; nous tournoyons autour du vieillard qui continue sa lecture. Je me sens comme un animal traqué, un gibier. Le tumulte de notre querelle alerte les éléments de la Garde, postés au coin de la rue adjacente. Ils viennent à nous, curieux de connaitre la cause du bruit ; mes assaillants s’empressent de parler ; ils élèvent la voix et agitent les bras.

J’apprendrai bien plus tard que mes agresseurs m’accusaient de m’être infiltré chez eux, vêtu en boubou, avec l’intention de commettre un vol. Je ne comprenais rien à ce qu’ils disaient, en Hassaniya. Les policiers nous arrêtent, tous et nous emmènent au commissariat d’Elmina 1. Le duo qui me pourchassait eut l’occasion de resservir sa version des faits, dans la même langue que les policiers. A la suite de leur récit, ils recouvrent la libérté. Les policiers me demandent mon identité et ma localité d’origine, je réponds à leurs questions.

Ils prolongent leur interrogatoire en s’intéressant à ma famille. Je leur précise que je vis avec mon épouse et mes deux enfants. Après l’interrogatoire, ils m’ordonnent d’entrer dans une petite cellule malodorante et referment la porte derrière moi. Pourtant, les objets que contenait mon sac prouvaient mon activité.

En début de matinée, les policiers m’extraient de la cellule et me reposent les mêmes questions. Ils me réclament mon numéro de téléphone, que je décline. J’explique ma condition d’ouvrier journaliser, qui cherche à nourrir sa famille, désormais sans ressources du fait de mon absence. Mon deuxième enfant est tout petit, mon épouse vient d’accoucher, je suis d’une condition très modeste, je ne saurais me permettre de m’absenter de mon lieu de travail. Quand je pense à ma femme et à mes enfants qui comptent sur moi seul, je me dis que je n’ai rien à faire au Commissariat et décide, alors, de m’enfuir.

Les deux policiers se lancent à mes trousses, et me rattrapent, à quelques mètres de là. Il se mettent à me tabasser de toutes leurs forces ; ensuite, ils me plaquent au sol et m’étranglent, le genou de l’un appuyé sur mon cou et le reste de mon corps immobilisé par le poids des deux. J’ai senti venir la mort et accepté, à cet instant, de ne plus bouger, ni parler, pour mettre toutes les chances de survie de mon côté.

Ils me ramènent au commissariat, me lient les pieds, grâce à une chaine en fer et me replacent à l’intérieur de la cellule. Plus tard, ils reviennent, me délient et exigent que j’atteste, de nouveau, mes identité et numéro de téléphone ; ils notent et me relâchent. Ils ont dû enquêter ou subir des pressions car je les sentais honteux. Ma détention ne dépassa pas une journée, mais une journée qui a failli être la dernière de mon existence. Je suis désormais libre mais sali face au monde entier : il a été dit que je suis étranger, voleur, délinquant, voire bandit notoire.

Quand l’information de ma mort a circulé, la police repartit à ma recherche. Ainsi, 4 jours après, le 24 juin, elle me retrouve et me reconduit au commissariat, le temps d’une petite discussion dont je ne comprenais pas trop les motivations, sauf peut-être me prouver (ou se prouver) que j’étais bien en vie, après mon passage entre leurs mains. Je ne leur ai rien dit de ma douleur mais il y a des choses à ne jamais infliger à un être humain car il nul n’en sort indemne. Je ne suis pas un menteur et moins un bandit ; tout ce que je leur ai exposé était clair, eux-mêmes l’ont reconnu, devant moi.

Ici, je veux d’abord remercier les bonnes volontés qui m’ont soutenu, sans me connaître, dès la sortie des photos de mon étranglement. A présent, je souhaite porter plainte. Je n’ai pas l’intention de laisser passer une telle injustice. C’est pourquoi, je prie, tous les mauritaniens, de m’aider dans cette démarche, afin de réparer le tort qui m’a été causé. Je souhaite poursuivre les auteurs de mon agression, qui ont failli entrainer ma fin. La police conserve leurs coordonnées. D’autres peuvent aussi subir mon sort, par hasard. J’ai été honni, mes parents à Waly et mes connaissances, partout ailleurs, ont enduré l’humiliation, avec moi. Je me retrouve couvert de honte et aurais pu mourir d’étouffement. Dieu merci, je commence à me remettre de mes courbatures et dois consulter un médecin.

Je sollicite, de mes compatriotes, si je peux prétendre encore au moindre droit dans ce pays, leur concours au rétablissement de ma dignité ; je forme le vœu de réhabiliter ma réputation de personne honnête. Je ne quémande pas car je sais gagner ma vie à la sueur de mon front.

Propos recueillis, à Nouakchott, le 26 juin 2020, par Madame Coumba Dada Kane, Députée à l'assemblée nationale, Vice-présidente d'IRA - Mauritanie





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Source : IRA-Mauritanie
Commentaires : 8
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Commentaires (8)

  • Ahmedabdallah (H) 29/06/2020 22:58 X

    Associationmainsales, as-tu pensé au fait qu'il se pourrait bien que monsieur Abou Djibi Diop, le Floyd mauritanien qu'Allah a sauvé des griffes criminelles de nos poulets, soit "né à Nouakchott" mais qu'il ait grandi à Wali, ou à Maghama! Nous savons bien que dans le subconscient collectif de gens de ta trempe l'acculturation des négro-mauritaniens est dores et déjà acquise au profit du dialecte hassaniya! Mais ayons du respect pour les gens de ces communautés différentes (soninkés, wolofs, poulards etc.) qui ont leurs langues, leurs cultures dont ils sont fiers, et que pour rien au monde ils ne troqueront pour le hassaniya exclusif!

  • yawonni (H) 29/06/2020 21:46 X

    Pas convainquant ce récit ! Au fait la police ne dispose pas de fichiers des bandits ? Si on se refere au dit récit la police nationale na pas besoin de neutraliser ce monsieur de cette façon.

  • fidelc (H) 29/06/2020 18:07 X

    Vraiment pour IRA tous les moyens sont bons pour servir ses fins politiques malsaines. Vous essayer de faire le buzz à partir de rien du tout. Vous voulez de surfer sur la vague Floyd en montant toute une histoire et un scénario mais en fin de compte vous n'apportez rien de concret.

  • Belphegor (H) 29/06/2020 17:45 X

    Récupération politique opportuniste d'un triste fait divers mais avec les apprentis pyromanes de l'IRA on est habitués de toutes façons.

  • ASSOCIATIONMAINSPROPRES (H) 29/06/2020 16:06 X

    Rocambolesque ! S'il ne comprend pas hassanya pour qui est né à Nouakchott. Menteur. A bas IRA. Ressemble à un Ghanéen plutôt.

  • Destroyer (H) 29/06/2020 14:27 X

    J etais prêt â t aider mais comme a politisé une affaire juridique. Désolé. IRA t utilisera à des fins politiques

  • rimois (H) 29/06/2020 14:17 X

    Ou sont les journalistes pour les investigations? Bon travail Madame la député pour les éclaircissements.

  • zder (H) 29/06/2020 14:15 X

    Ils étaient 3 embarqués à la police, lui et les 2 autres bandits tueurs. Mais les vrais bandits eux ont été relâchés parce que parlant hassanya, et lui a été retenu parce qu'il ne sait pas parler hassanya et du coup il a été soupçonné d'être un étranger, donc un bandit et même un criminel qui s'attaque à la police. Ce qui prouve que le racisme est la seule vraie pandémie dans le monde, et même la religion n'a rien pu faire contre le racisme et la haine anti-noir