28-12-2020 13:12 - Loi relative aux associations : Prémices d’une ère nouvelle pour la sociéte civile mauritanienne

Loi relative aux associations : Prémices d’une ère nouvelle pour la sociéte civile mauritanienne

Abdallahi Mohamed Abdallahi - Depuis vendredi dernier, la société civile mauritanienne jubile à l’idée de disposer, désormais, d’un cadre juridique et institutionnel garantissant à la fois : (i) la liberté et le droit d’association et d’organisation ; (ii) la pleine participation à la conception, à la mise en œuvre et au suivi-évaluation des politiques publiques.

En effet, nos honorables députés planchent actuellement sur un projet de loi relatif aux associations, aux réseaux et aux fondations, soumis à leur examen par le gouvernement.

Attendu depuis plus d’une décennie, ce projet de loi, composé d’une dizaine de grands titres et d’environ soixante-dix articles, présente les caractéristiques suivantes :

- Il est le fruit d’un dialogue inclusif issu d’une série de concertations entamées fin 2006-début 2007 et qui se sont poursuivies, par intermittence mais sans relâche ;

- Il rompt carrément avec les textes précédents, notamment avec la loi 64-098 et tous ses amendements et réajustements, en instaurant le régime déclaratif (régime de liberté) en lieu et place du régime d’autorisation (régime répressif) ;

- Il définit, clairement et nettement, les concepts, les droits, devoirs et obligations des associations.

La force du présent texte, il la tire surtout du fait qu’il a été soumis, au préalable sous forme d’avant-projet, au débat avec les représentants des OSC par le Département chargé des Relations avec la société civile.

C’était au cours d’un atelier organisé en début d’année, animé par deux juristes ayant travaillé souvent sur le droit relatif aux associations et qui a regroupé une centaine d’acteurs associatifs impliqués dans le processus il y a belle lurette.

Signe de l’intérêt qu’il accordait à cette loi, le Commissaire aux Relations avec la Société Civile ne s’était pas contenté d’ouvrir l’atelier et partir, comme c’est la tradition chez certains hauts responsables de l’Etat. Il avait tenu à suivre les travaux de l’atelier, assisté de tout son staff et s’était donné la peine de prendre part lui-même à la rédaction de la synthèse en collaboration avec les consultants et les rapporteurs, en présence de quelques experts de la société civile.

Ensemble, ils avaient revu et nettoyé le texte avant sa validation, en tenant compte des différents points de vue exprimés par les participants.

Mieux, le Commissaire a mené un plaidoyer soutenu auprès de ses pairs en vue de l’adoption du système déclaratif tel que nous l’avions, tous, recommandé et souhaité.

Aussi, peut-on dire, sans exagération, que ce projet de loi émane bel et bien de la volonté croisée des autorités compétentes et des associations concernées, comme l’a si bien indiqué Monsieur Mohamed EL Hacen Ould Boukhreiss, dit Hassenna, lors d’une émission télévisée mercredi soir.

Par conséquent, il va sans dire que les deux parties en tire des avantages réciproques considérables. En adoptant le système déclaratif, le gouvernement se sera aligné sur les standards universels des libertés publiques en se conformant aux conventions et pactes internationaux.

Il aura également respecté, à la lettre et dans son esprit, sa propre constitution (article 10), ainsi que les clauses de la Stratégie Nationale de Lutte contre la Corruption adoptée en Conseil des Ministres, le 9 décembre 2010, dont le paragraphe 41 dispose : « la loi sur les associations sera révisée pour faciliter l’action associative dans l’intérêt général. Les associations agrées disposeront d’un accès aux médias audiovisuels pour s’exprimer ».

Les Organisations de la Société Civile (OSC), jouiront, quant à elles, dans le cadre de la nouvelle loi, de plus de liberté et de marge de manœuvre car il est dit explicitement, en son article 5, Titre II : « les associations de personnes se constituent, librement, et sans autorisation préalable ». Or, leurs préoccupations essentielles, exprimées lors de l’atelier de 2015 se résumaient en ces deux points :

1)- l’instauration d’un régime déclaratif ;

2)- l’institutionnalisation de l’implication efficace et effective dans l’action publique.

Une ère nouvelle pour la société civile se pointe alors à l’horizon, surtout que cette loi sera suivie, selon le Commissaire, d’une série de mesures, dont notamment :

- L’élaboration d’une stratégie de promotion de la société civile ;

- La mise en place d’une banque de données relatives au mouvement associatif dans le pays ;

- L’évaluation de la Plateforme des acteurs non étatiques en perspective de l’émergence d’une structure faîtière propre à la société civile ;

- La réflexion autour de la création d’un mécanisme de financement pour la société civile. Autant dire qu’un avenir meilleur se dessine devant les associations nationales qui ont enregistré un développement spectaculaire, ces dernières années, tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif.

Abdallahi Mohamed Abdallahi Dit Bellil



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Commentaires (2)

  • Sahelien-morali (H) 28/12/2020 17:58 X

    Doyen, merci pour l’éclairage sur la portée du projet de loi dans un domaine que vous connaissez bien. Doyen, la société civile, dont vous êtes le doyen, a un autre sujet d’actualité plus urgent que celui d’apprécier un projet de loi, un autre sujet grave dont vous êtes au courant. C’est celui des poursuites judiciaires de la gabegie de la décennie passée que le régime actuel a cessé de traiter. Pourtant, on vous connaît une sagesse et un patriotisme et il vous aurait bien convenu de commencer votre article en rappelant l’urgence de continuer ces poursuites judiciaires de la gabegie de la décennie passée pour récupérer les biens détournés dont l’ampleur est sans précédent dans l’histoire du pays et dans la sous-région ouest africaine. Vous êtes parmi les personnalités dont la conscience ne pourra pas supporter pour longtemps d’ignorer ce casse du siècle.

  • Aboulamine (H) 28/12/2020 14:34 X

    Merci doyen pour ce compte rendu détaillé et surtout à titre volontaire ! Nous comprenons bien votre souci. C'est bien d’avoir tout ce décor juridique et règlementaire pour le bon fonctionnement de la société Civile. Mais ce cadre et mécanisme juridique n'aurait de sens que lorsqu'il aurait de répondants forts et professionnels représentant un corps de société civile qui comprend d'abord le sens et la vocation de ce domaine qui consiste à s'occuper de façon désintéressée des intérêts des autres. Or, les organes de la société civile que nous voyons chez nous, ne sont d'abord que des structures familiales ou entre amis qui finalement ne voient émerger qu'une seule personne appelée Président qui bouge dans tous les sens sans aucune approche participative ou de chance de rélève si par chance il ya un contenu réel et un domaine d’intervention précis pour cette structure. En général, si par malheur Le Président disparait c’est toute la structure qui disparait avec lui car aucune préparation pour la relève n’était programmée. A toutes fins utiles, je recommanderais ce qui suit dans une approche participative : - Par les temps qui courent avec la fracture numérique, créer un cadre de communication virtuelle pour cette plateforme de la société civile qui peine à se faire connaitre. Ainsi on pourrait y diffuser toute information utile concernant les rencontres et autres actualités de la société civile pour que tout le monde soit au même niveau d’information. - Professionnaliser la société civile Mauritanienne, mettre sur pied un outil d'identification d'évaluation de la société civile pour savoir qui fait quoi et avec quel impact pour la communauté. - Organiser les Etats Généraux de la société civile dont les travaux serviront de balise pour les pouvoirs publics en vue de la refonte de la société civile. ---------------------------- Abou Lamine DIENG Action pour le Développement Communautaire /Sebkha (ADS)