17-07-2025 11:54 - Mauritanie : le délestage à Nouakchott révèle les fragilités structurelles du secteur

(Agence Ecofin) - Malgré un potentiel élevé en énergies renouvelables et en gaz naturel, la Mauritanie fait toujours face à des contraintes pour assurer un accès fiable et durable à l’électricité, comme le rappellent les coupures actuelles à Nouakchott.
Nouakchott connait depuis plusieurs semaines des délestages électriques prolongés. Pour de nombreux habitants et travailleurs qui ne peuvent pas se procurer des groupes électrogènes, la situation est compliquée, avec des retards de production et des baisses de revenus. La précarité énergétique reste ainsi une réalité pour beaucoup de Mauritaniens.
Ces perturbations récurrentes mettent en lumière un écart persistant entre les ambitions affichées par le Pacte national de l’énergie et les contraintes opérationnelles.
Selon ce document élaboré dans le cadre de l’initiative Mission300, la Société Mauritanienne d'Electricité (SOMELEC) absorbe en moyenne 2% du PIB chaque année en transferts publics — un pic de 3,2% en 2019 — pour couvrir notamment un réseau fragmenté, vieillissant et peu rentable.
En 2023, la production globale a atteint environ 1,66 TWh pour une puissance installée de 615 MW, mais seulement 520 MW étaient réellement disponibles alors que la capitale concentre une grande part de la consommation nationale. Interrogée par Le360, la SOMELEC invoque « des travaux non coordonnés » pour expliquer les coupures. Mais les causes dépassent ce seul argument technique.
Pertes technico-commerciales élevées (près de 30% en cumulé), réseaux urbains sous-dimensionnés, dépendance persistante aux hydrocarbures importés, etc. Autant de facteurs qui font souligner au ministre de l’Économie Sid Ahmed Ould Bouh, cité par l’agence d’information locale Saharamedias, « l’incapacité de l’offre à répondre à la demande » et « la dominance de l’électricité fossile dans le mix ».
Pourtant, les promesses du Pacte national de l’énergie sont ambitieuses. Faire passer le taux d’accès de 55% à 100% d’ici 2030, porter la part des énergies renouvelables à 70% et multiplier la capacité installée par 1,66. Avec un potentiel solaire et éolien considérable, la Mauritanie pourrait réduire sa vulnérabilité et ses coûts structurels. Mais pour les habitants de Nouakchott, ces objectifs restent encore lointains face à l’urgence de garantir un service continu.
Le défi dépasse donc la seule construction de nouvelles centrales. Il implique une modernisation du réseau de distribution, une meilleure coordination des travaux et une réduction drastique des pertes techniques et commerciales. Sans cela, le fardeau financier de la SOMELEC continuera d’alourdir le budget public, malgré les engagements ambitieux fixés dans le cadre de la Mission300.
Abdoullah Diop