27-07-2018 09:54 - Les enjeux de l’assainissement à Nouakchott à l’horizon des premières élections régionales

Les enjeux de l’assainissement à Nouakchott à l’horizon des premières élections régionales

Ebaye EMINE - Les prochaines élections régionales du septembre prochain s'annoncent déjà complexes, politiquement parlant, vu le poids que représente chacun des candidats désignés par les différentes formations politiques du pays.

Sur le plan apolitique, nous nous permettons d’aborder la thématique assainissement dans les horizons de cet imminent scrutin afin d’éclairer le (la) futur(e) président(e) de la région de Nouakchott sur ce dossier.

En effet, la nouvelle réorganisation territoriale qui a donné lieu à la création d’une Région au niveau de la ville (lors du Conseil des ministres du jeudi 04 janvier 2018) nous mène à traiter le volet organisationnel de ce dossier important qui préoccupe la population de la capitale.

C’est donc au Président-e de cette nouvelle région de veiller à l’amélioration de la gestion de ce dossier, dans la mesure où le développement et l’attractivité de la ville en dépend en grande partie. Notons que, pour le projet d’évacuation des eaux pluviales en cours de réalisation par l’entreprise chinoise CTCE dont les travaux avaient commencé en août 2016, le taux d’avancement global pondéré a dépassé les 90%, et que la réflexion sur la mise en place d’un réseau d’assainissement moderne couvrant les neuf communes de la capitale est en stade avancé.

Nous allons distinguer dans cette brève note de sensibilisation, entre l’assainissement des eaux usées, et le drainage des eaux pluviales. L’assainissement des eaux usées est un service essentiel d’intérêt général qui présente des enjeux sociaux, sanitaires et environnementaux majeurs. De ce fait, il relève de la responsabilité de l’autorité publique compétente en matière d’assainissement, qui assure le rôle de maître d’ouvrage. Dans le cas mauritanien, et donc à Nouakchott, le service d’assainissement est centralisé au niveau de l’État (ONAS).

Cependant, la nouvelle réorganisation territoriale a donné lieu à la création d’une Région au niveau de la ville. Cette Région qui succèdera à la place de la communauté urbaine de Nouakchott (CUN), aura-t-elle la compétence assainissement ? La réponse n’est pas précisée, du moins à l’heure actuelle. Quelque soit le futur mode de gestion pour le service assainissement au niveau de Nouakchott (Etat ou collectivité-Région-) et dans une projection qui vise à mieux assurer la gestion technique, administrative et financière du service, il est indispensable que cette gestion puisse satisfaire les aspects suivants :

- offrir aux usagers un service de qualité, respectueux des normes techniques et sanitaires adaptées au contexte local ;

- définir les rôles et responsabilités des différents acteurs du service ;

- garantir le fonctionnement en continu du service à des tarifs abordables ;

- s’assurer qu’un maximum d’usagers ait recours au service selon des pratiques favorisant le maintien en bon état des infrastructures et équipements.

A ce niveau, il convient de veiller à ce que les eaux usées industrielles rejetées dans le réseau collectif soient bien caractérisées (qualitativement et quantitativement). Cette caractérisation précise des rejets permettra le gestionnaire du réseau de discuter les modalités d’injection dans le réseau collectif : prétraiter l’eau avant son rejet dans le réseau collectif ou payer en fonction de la charge polluante à injecter.

- réaliser un suivi ainsi qu’un contrôle du service afin de garantir son fonctionnement et de pouvoir en rendre compte aux usagers.

La mise en place d’un système de gestion permettant d’atteindre ces objectifs peut se diviser en trois composantes.

- Organiser la gestion du service : cette étape, préalable à la mise en place du dit service, concerne le maître d’ouvrage.

- Mettre en œuvre la gestion au quotidien : cette responsabilité incombe à l’opérateur de service.

- Organiser et mettre en œuvre un suivi-contrôle du service : cet aspect est de la responsabilité du maître d’ouvrage.

Il faut souligner que l’organisation de la gestion d’un service d’assainissement est un préalable à son démarrage.

En ce qui concerne le drainage des eaux pluviales, plusieurs principes généraux peuvent être suivis pour encadrer la gestion intégrée de ces eaux, de la source jusqu’au milieu récepteur. Pour cela, nous citerons ci-après 10 principes directifs en la matière :

1. Développer une logique d’intervention par bassin versant, en adoptant une vision globale et intégrée de la gestion des eaux pluviales.

2. Prévenir la pollution et l’entrée des polluants dans le réseau de drainage est toujours la première approche à privilégier.

3. À moins qu’il n’y ait de contre-indication (par exemple avec une source potentielle de matières toxiques, des prises d’eau à protéger ou des conditions particulières de nappe souterraine), viser à infiltrer autant d’eaux de ruissellement qu’il est possible.

4. Tenir compte des conditions hivernales dans l’application des différentes pratiques.

5. Un couvert végétal est toujours mieux qu’un sol dénudé et le couvert végétal naturel est toujours mieux qu’un couvert végétal aménagé (les taux d’infiltration variant de façon importante selon les différentes conditions).

6. Prioriser l’utilisation de pratiques qui requièrent peu d’entretien ou de suivi pour fonctionner adéquatement.

7. Une attention appropriée lors de la conception et de bonnes méthodes de construction permettront de réduire les activités d’entretien et de maintenir à plus long terme la performance des ouvrages.

8. Un entretien adéquat prolongera la vie utile des ouvrages et permettra d’assurer que les performances attendues se maintiennent.

9. Chaque site demande une caractérisation spécifique de façon à établir les besoins pour la gestion des eaux pluviales et pour définir les meilleures pratiques de gestion dans chaque cas.

10. Les conceptions doivent considérer tous les impacts, incluant les facteurs environnementaux, la sécurité, l’entretien et les coûts à supporter.

Cependant, dans un contexte nouakchottois caractérisé par d’énormes préjudices causés par ce qui semble être une montée de la nappe phréatique, favoriser l’infiltration n’est bien évidement pas la bonne démarche à entreprendre. Egalement, il est important d’éviter l’installation des populations ou des sites d’intérêts sur la côte fragilisée par l’érosion et l’extraction du sable pour des fins de lotissement, sans oublier le phénomène du réchauffement climatique et son impact sur les zones côtières. Cette idée que nous avons toujours défendue, repose sur le principe du recul stratégique, que nous jugeons plus pertinent et approprié pour la ville (moyens et capacité de lutte, nature de l’aléa, aspect morphologique…).

Concrètement, un modèle organisationnel réussi de la gestion durable des eaux pluviales à Nouakchott, doit d’articuler sur une approche durable et participative intégrant toutes les parties concernées (Région, direction de l’assainissement, ONAS, ATTM-SA). Rappelons que le Conseil des ministres du 19 octobre 2017, a décidé d’intégrer par voie d’absorption l’ENER à ATTM-SA de manière à faire assurer le service public de l’entretien routier par cette dernière (la Société Absorbante) et de faire l’économie des charges publiques récurrentes générées par l’autre (l’Entité Absorbée), je cite. Il est opportun de signaler également qu’il est courant dans beaucoup de collectivités territoriales de rattacher la gestion des eaux pluviales au service de la voirie.

En conclusion, nous pensons que les leviers de succès d’une gestion durable des installations d’assainissement (eaux usées et pluviales) sont la connaissance fine du milieu et contexte pour pouvoir élaborer des actions efficaces dans une approche d’optimisation des impacts.

Bibliographie :

Mémento de l'assainissement, Éditions Quæ, Éditions du Gret, 2018, 844p

Guide de gestion des eaux pluviales, Ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs et le Ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire au Québec, 2014, 386p.

Ebaye EMINE : ebaye.emine@laposte.net,
Hydro-environnementaliste.



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Source : Ebaye EMINE
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