04-10-2019 09:12 - Mali, le château de paille militaire vacille

Mali, le château de paille militaire vacille

La Croix - Incapables de résister seules aux katibas islamistes, les forces armées maliennes ont été submergées, lundi 30 septembre, par un groupe armé. Elles ont repris leur position avec l’aide déterminante de la force Barkhane, le 1er octobre.

À bien des égards, ce qui vient de se passer rappelle le début de l’année 2012, l’époque des batailles perdues par les Forces armées maliennes (Fama) contre les groupes armés du nord du Mali. Sans l’appui des forces françaises de Barkhane, sans le soutien des casques bleus, elles auraient à nouveau été balayées comme fétu de paille, du fait de la détermination de leurs ennemis.

Les Fama ont été submergés dans leur base

Cette fois, la confrontation a eu lieu dans leur camp de Boulkessi et au poste militaire de Mondoro, dans la région de Mopti, lundi 30 septembre et mardi 1er octobre.

Les Fama ont été incapables de repousser les deux opérations, abandonnant leur position aux assaillants. Il a fallu l’intervention de l’aviation française et des forces internationales pour qu’elles reprennent pied chez elles.

À quel prix ? Officiellement, les Fama ont perdu 25 hommes. Un bilan encore provisoire, daté du 1er octobre, qui ne tient pas compte des dizaines de soldats portés disparus : 60, selon plusieurs sources. Côté djihadistes, le nombre de tués s’élèverait à 15, selon le même communiqué officiel.

La culture du mensonge et de la défiance

Des chiffres à prendre avec précaution tant les autorités du Mali ont pris l’habitude de taire ou de minorer leurs pertes : une règle qui nourrit la défiance et le ressentiment des Fama. À la veille de la présidentielle de 2018, déjà, les observateurs s’inquiétaient du vent de révolte dans l’armée contre le président sortant, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK). Une habitude dans ce pays à l’histoire rythmée par les coups d’État : le dernier, du capitaine Sanogo, avait renversé le prédécesseur d’IBK, Amadou Toumani Touré (ATT), en mars 2012.

Une vérité qui dérange

Si le bilan se confirme à la hausse, cette double attaque dans la région de Mopti serait l’une des plus meurtrières depuis la reconquête du nord du pays par l’armée française, en 2013. Elle livrerait une vérité que les autorités maliennes, françaises et européennes tentent de minorer publiquement : leur incapacité à gagner la guerre contre le terrorisme dans le Sahel.

L’identité des assaillants, le groupe burkinabé Ansarou Islam, jette une lumière encore plus crue sur l’échec de l’architecture sécuritaire mise en place par la France sous François Hollande et poursuivi par Emmanuel Macron. En effet, le voilà capable de frapper loin de ses bases et de son terrain favori, au Burkina Faso.

Violence au Mali, la spirale infernale

Plus grave est la nature des éléments défaits à Boulkessi : le bataillon malien du G5 Sahel (la force conjointe formée par le Mali, le Burkina Faso, la Mauritanie, le Niger et le Tchad). Sa déroute représente aussi un échec pour l’Union européenne et la France, engagées, depuis 2013, dans la rénovation de l’armée malienne, la mission de formation de l’UE au Mali (EUTM Mali).

Présentée depuis 2013 comme la solution à la faillite de 2012, l’EUTM Mali apparaît de plus en plus inadaptée à la réalité sociale, politique et historique du pays. Comme toutes les formations militaires engagées par la France depuis les années 1960, ou par les États-Unis, depuis les années 1990.

Sept soldats maliens tués le 26 septembre

L’échec, répété d’année en année, nourrit le scepticisme international quant à la réussite du G5 Sahel : même la France, qui a présidé à la constitution de cette force sous François Hollande, doute de plus en plus ouvertement sur ses chances de réussite.

Ces attaques du 30 septembre et 1er octobre s’ajoutent à celle du 26 septembre : un convoi de transport d’engrais escorté par les Fama, entre Douentza et Sévaré, a été stoppé par un engin explosif artisanal, puis attaqué par les djihadistes. Sept soldats maliens sont morts.

« Nous sommes en train de perdre du terrain », s’alarme l’ONU

Lors d’une réunion de haut niveau consacrée au Mali et au Sahel, mercredi 25 septembre en marge de l’assemblée générale de l’ONU, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres s’était alarmé de « l’escalade continue de la violence au Sahel et son expansion vers les pays du golfe de Guinée ».

Djihadisme, la peur s’étend dans le nord du Bénin

« Soyons clairs, nous sommes en train de perdre du terrain face à la violence et au terrorisme », avait-il admis. Dans les pays du G5 Sahel, « le nombre de morts civiles entre 2012 et 2018 a été multiplié par quatre », a-t-il dit. « Plus de cinq millions de personnes ont besoin d’aide humanitaire, plus de quatre millions ont été déplacés, trois millions d’enfants ne sont pas scolarisés et près de deux millions de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire ».



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Commentaires (4)

  • Bertrand (H) 04/10/2019 16:59 X

    C’est faux les forces françaises n’ont pas aidé à la reprise des positions parce que les attaquants mènent une guerre d’usure ils attaquent et disparaissent avec leurs butins et ne restent pas en place. Les forces maliennes ont perdus’es leur autonomie quand elles sont devenu des forces cassaient aux forces étrangères qui colonisent le Mali à nouveau.

  • Jamalagare (H) 04/10/2019 10:14 X

    Les armées africaines ne sont pas républicaines. Le recrutement se fait sur la base tribale, ethnique ou raciale et non sur les compétences. Comment vous voulez-vous que ces armées défendent un pays ? C’est une armée soit tribale, raciale ou ethnique. Ces des fausses armées

  • disponible (H) 04/10/2019 09:43 X

    tout ça c'est vous les français. les pyromanes.

  • lass77 (H) 04/10/2019 09:39 X

    J'avais écrit ici que cette histoire de G5 Sahel est une vaste escroquerie , c'est du colonialisme déguisé. IBK doit démissionner pure et simplement. Si certains ne comprennent pas sur ce qui se trame au Mali, doivent se réveiller.