24-12-2020 09:12 - Samory Bèye (CLTM) : "Le dossier de la gabegie semble moisir dans les tiroirs...

Samory Bèye (CLTM) :

Le Calame - ..., en attendant de trouver la bonne formule pour l’enterrer"

Samory ould Bèye est le président du Conseil National du parti Moustaqbel et Secrétaire Général de la Confédération Libre des Travailleurs de Mauritanie (CLTM). Entretien -

Le Calame : Alors que les syndicalistes que vous êtes attendent un dialogue social inclusif en panne depuis des années, le gouvernement a décidé de fonder un Conseil chargé du dialogue social. Qu’en pensez-vous ?

Samory Bèye : Ce Conseil National de Dialogue Social (CNDS) n’a rien à voir avec le dialogue social ou concertation tripartite prévue par la loi et les conventions internationales de l’OIT, dont l’objectif est de discuter des grandes questions du monde du travail entre les partenaires sociaux.

À cet égard, nous nous réunissons justement le lundi 21 décembre 2020, afin de discuter d’aussi importantes questions que le rehaussement du taux de cotisation patronale à la CNSS, la protection sociale et les pensions. Quant au CNDS institué par arrêté du ministre du Travail et de la fonction publique, sa mission reste à définir.

-Comme en politique, on note une pléthore de syndicats et cela entrave évidement le travail syndical. La question de la représentativité demeure sur la table depuis quelques années. Où en est le combat pour le renouvellement des organisations syndicales ?

- La Mauritanie ne compte qu’à peine quatre millions d’habitants et une quarantaine d’organisations syndicales :c’est d’autant plus une pléthore que la plupart de ces organisations sont fictives, des organisations « jaunes » qui gênent beaucoup le travail syndical et fragilisent les organisations syndicales qui remplissent réellement leur mission et leur rôle de partenaires sociaux crédibles, disposant de l’expertise et du professionnalisme à même de défendre les intérêts matériels et moraux des travailleurs.

Devant cette situation, le BIT insistait auprès du gouvernement mauritanien depuis 2008, afin qu’il engage un vrai processus d’élections sociales. Mais c’est seulement en Septembre 2020 que le ministre du Travail et de la fonction publique a pris un arrêté à l’adresse du patronat et toutes les institutions, en leur demandant d’organiser sans tarder les élections des délégués du personnel au sein de leurs sociétés.

C’est au dépouillement des résultats de ce scrutin que les organisations syndicales seront classées et celles qui ne franchiront le seuil fixé par la loi disparaîtront.

Mais le gouvernement semble indécis et laconique, voire confus, nous le constatons, dans sa position et sa responsabilité d’organiser dans de bonnes conditions ces élections, en concertation avec les organisations concernées.

-Quel est l’impact, selon vous, du COVID19 sur les travailleurs des secteurs sociaux ? Ont-ils bénéficié du fonds spécial mis en place par le gouvernement lors de la première vague ?

-S’agissant de l’impact néfaste du COVID19, je peux dire que cette pandémie a pesé lourdement sur la population, particulièrement les groupes les plus vulnérables et démunis. Les promesses, les engagements de Taazour et ceux du gouvernement furent au final décevants, sans effet ni impact.

Seules quelques familles dont le recensement a été réalisé sur la base du clientélisme traditionnel, loin de la transparence et de l’équité, en ont bénéficié. Le programme était en lui-même partiel et limité, géré unilatéralement, sans implication de la Société civile et des acteurs non-étatiques.

-Quelle lecture faites-vous de l’état d’avancement du « « dossier corruption » impliquant plus de trois cents personnes dont l’ex-Président Mohamed ould Abdel Aziz ?

-Le dossier de la gabegie semble moisir dans les tiroirs, en attendant de trouver la bonne formule pour l’enterrer : tout le monde est mouillé, totalement empêtré dans ce crime odieux.

Ceux censés diriger et gérer les affaires du pays se trouvent au cœur de cette opération de dilapidation des deniers publics et du potentiel de notre pays, détruisant le fondamental de la Nation, brisant dans l’esprit du citoyen la notion même de l’État et sapant les espoirs légitimes de notre peuple à vivre dans le progrès social et le développement humain durable, dans un contexte national de paix, d’harmonie et de cohésion sociales. Le pays se retrouve dans l’inertie et le chaos.

C’est une situation qui nous inquiète beaucoup pour le devenir de la Mauritanie aujourd’hui au bord du gouffre, suite à une gabegie effrénée de grande échelle et d’une ampleur sans précédent dont les auteurs, rapaces, brillent sans être inquiétés et continuent à dilapider impunément nos biens publics, sans rien épargner.

Les trois cents que vous évoquez et sûrement d’autres encore sont malheureusement complices, tous ont trahi la cause nationale et tous méritent le châtiment pour leurs méfaits et manquements.

Face à cette situation d’une extrême gravité, le peuple doit s’éveiller et se révolter, seule voie salutaire pour rétablir l’ordre et le respect de la chose publique et bannir les infâmes pratiques de violation des droits et principes de bonne gouvernance.

-Depuis l’élection du président Ghazwani, l’opposition reste amorphe. Quelles sont, selon vous, les raisons de ce silence ?

-L’opposition s’est défilée en se confondant avec la majorité. Toutes les deux sont à l’agonie, tandis que la situation du pays empire de jour en jour. Les problèmes s’accumulent à tous les niveaux, tant aux plans social, économique, humain qu’en ceux de la cohésion sociale, de l’unité nationale et du vivre ensemble. Nous souffrons d’une politique et d’un système d’une extrême ambiguïté périlleuse et morbide qui pousse à l’enlisement et l’engouffrement. Ceci pour dire que toutes les raisons justifiant une opposition active sont là, pertinentes et motivantes. Et pourtant…

-Que suscite chez vous le nombre de contaminations et de morts de la 2e vague COVID19 ? La réaction du gouvernement est-elle à la hauteur des inquiétudes des Mauritaniens ?

-Ce nombre inquiétant des contaminations et de décès atteste l’échec de notre système sanitaire qui s’est avéré précaire mais aussi de notre politique nationale en manque de vision et de cohérence. Des carences amplifiées par la mauvaise gestion et la gabegie qui gangrène notre modèle de gouvernance.

Propos recueillis par Dalay Lam



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Commentaires (9)

  • Belphegor (H) 27/12/2020 12:03 X

    @Ahmedabdallah Vous ne pouvez qu'être déçu de Biram car malgré toutes les preuves évidentes de ses multiples compromissions et retournements de vestes vous vous forcez à croire que son engagement était sincère et dénué de toute ambition personnelle. Le Mandela auto proclamé n'est qu'un arriviste sans scrupules, il n'y a que ceux comme vous qui l'ont mis sur un piédestal et l'ont voué un culte de la personnalité qui dépasse l'entendement qui sont déçus de son attitude, il sortira de son silence et se remettra à vociferer comme avant lorsqu'il voudra faire pression sur le régime pour obtenir d'autres avantages et prébendes personnels mais pour le moment sa bouche et ses poches sont pleines.

  • Sahelien-morali (H) 25/12/2020 13:50 X

    Effectivement, Il ne faut pas demander au président Ghazouani plus que ses capacités. Il faut l’aider à s’en sortir et à faire avancer les poursuites judiciaires, ou encore, les faire avancer sans lui. Il ne fera rien contre si vous le faites. L’ampleur de cette gabegie de la dernière décennie est sans précédent dans l’histoire du pays et dans la sous  région ouest africaine. Personne ne pourra longuement se mettre sur la conscience de défendre ce casse du siècle, y compris Ghazouani lui-même et les quelques avocats qui défendent encore cette affaire de gabegie. Ils ne pourront pas longuement se mettre cela sur leur conscience. Même, nos partenaires étrangers des grandes nations ne pourront pas longuement se mettre sur leur conscience de soutenir ou de rester spectateurs de cette triste scène.

  • activiobservat (H) 25/12/2020 13:02 X

    Ghazouani a distribué à gauche et à droite toutes sortes d’avantages, des réparations, améliorations des salaires, sécurité sociale, et enfin des distributions des milliards aux populations pour faire face au coronavirus, mais aussi pour le laisser tranquille car il a une frousse terrible et un embarras qui l’habitent et l’empêchent d’avancer dans les poursuites judiciaires de la dernière décennie. Il a gardé cette peur de son prédécesseur depuis qu’il le servait comme Chef d’Etat-major. Cette même peur l’avait poussé à bien garder le pouvoir pour son prédécesseur au moment où ce dernier était hospitalisé. La même peur l’a obligé d’accepter d’être candidat à la présidence en 2019 à la demande de son prédécesseur. La même peur l’oblige maintenant à faire passer le temps pour retarder les poursuites des personnes impliquées dans l’affaire de la dernière décennie. Il ne faut pas lui demander plus que ses capacités. Il faut l’aider à s’en sortir.

  • Ahmedabdallah (H) 25/12/2020 02:13 X

    Voilà un homme d'une extrême lucidité, et d'un courage remarquable! Samory est, de fait, le seul vrai homme politique digne de l'opposition aux politiques indécises et acrobatiques de l'actuel général de salon, Ghazou! Samory a remporté la vedette y compris devant mon jeune frère Biram Dah Abeid qui s'est copieusement dégonflé depuis qu'il a "bénéficié" de deux ou trois tête-à-tête avec sieur Ghazou! Le spectacle actuel de la Mauritanie est d'une tristesse! L'ancien dictateur mécanicien brutal Aziz est un homme d'une intelligence politique incomparable tel qu'il savait bien ce qu'il faisait en laissant la Mauritanie ingouvernable après ces "mandats" entre les mains du mollasson indécis poltron Ghazou! Oui, Ghazou le peureux se trouve aujourd'hui dans une situation inextricable et ne sait plus où donner de la tête! C'est donc encore et toujours la même malédiction de notre malheureuse Mauritanie qui continue, et les opposants" de pacotille, tous autant qu'ils sont, à l'exception de Samory Ould Beye observent la situation les bras ballants!

  • activiobservat (H) 25/12/2020 02:05 X

    Tout le monde espérait que Ghazouani va finalement avoir du courage et abandonner cette attitude de peur et d’hésitation qui l’habite. Sa manière de ménager les intérêts de son prédécesseur de la dernière décennie n’est ni dans l’intérêt de son prédécesseur et c’est dangereux pour Ghazouani lui-même et pour la nation. Les répercussions de cette manière de faire risquent d’arriver en moyen et long terme en boomerang. Sous l’ampleur des dégâts, le pays s’est affaissé mais il ne s’est pas encore écroulé. On peut espérer qu’il peut se relever, mais…mais…mais, le problème est que celui ou ceux qui ont causé les dégâts de la dernière décennie, il y a encore dans notre pays d’autres qui ont exactement leur profil, leur éducation, leur niveau, leur soucis. Et ces gens-là du même profil que lui, qu’eux, vont se dire que c’est faisable, qu’il faut qu’ils réalisent eux aussi exactement le même exploit que le copain qui était du même genre qu’eux, du même profil, qui ne pensait pas pouvoir ni devoir un jour s’occuper des affaires publiques à un si haut niveau. Alors, ces gens-là du même profil feront tout pour avoir leur décennie, leur tour comme Président de la république, avec un partenaire fidèle à l’état-major de l’armée et réaliser des exploits (dégâts) plus importants pour avoir une fortune au moins égale à celle amassée dans le régime précédent. Les copains se comparent entre eux. Et, cette fois, cette décennie-là, le pays ne va pas seulement s’affaisser, il va s’écrouler. Sauf sursaut venant de quelque part. Il va s’écrouler sur nous autres, sur tout le monde y compris ceux des dégâts de la dernière décennie et ceux du même profil qui vont venir faire la même chose demain ou après-demain dès qu’ils constatent que les dégâts précédents sont passés impunis malgré leur ampleur, ou que leur auteurs ont pu garder tout ou une partie de ce qu’ils ont détourné. En gardant une partie de ce qu’ils ont détourné, ils sont toujours gagnants et c’est motivant pour ce genre de profils pour aller dans l’aventure. اللهم لا تؤاخذنا بما فعل السفهاء منا

  • Destroyer (H) 24/12/2020 13:55 X

    Il a été enterré le jour où il était né. Le président continue à contacter les individus cités dans le rapport. Il cherche à les blanchir pour les ramener comme s'ils étaient indispensables alors qu'ils ne sont tous que de gros voleurs. De ould Bechir à hademine en passant par ould Abdel vetah, ould Diaye... sans oublier le reste de la bande. Même au chômage, leur train de vie n'a pas changé grâce aux montants accumulés

  • Bertrand (H) 24/12/2020 11:38 X

    Très bien dit. Samoury biye a fait mouche pour parler un langage que nos dirigeants doivent encore comprendre en depit du luxe et la mollesse où ils vivent depuis des décennies sur le dos du pauvre citoyen.

  • habouss (H) 24/12/2020 09:52 X

    Mon cher Samory, inchaALLAH tu auras une longue vie pour assister comme à un théâtre des ombres, aux prochaines images de traitement de dossier de gabegie au début de la magistrature du prochain général (Hanana ou Meguet) qui sera au pouvoir. C'est pour te dire que ces agissements sont destinés à amuser la galerie au début de mandat. Tu avais assisté à la mise en tôle des hommes d'affaires Idawali au début du mandat de présumé grand voleur de la Mauritanie de tous les temps. On échappe pas au même scénario, car pour franchement traiter les dossiers de gabegie, il faut remonter à la naissance du PRDS et ainsi, vous pouvez évaluer le nombre de personnes hors tombe qui seront devant la justice. Impossible, donc Passons !

  • hamaodo (H) 24/12/2020 09:33 X

    tout est dit tout y passe.c'est bon;harratines réveillez vous.