30-07-2025 15:27 - De l’ombre à la lumière : l’ascension d’un homme seul et l’héritage d’un géant.

Senalioune -- Il est des parcours qui n’obéissent ni aux lois du nombre, ni aux règles de la facilité. Des itinéraires d’hommes qui, dans le silence des marges, forgent un destin national.
L’ascension politique du professeur Mohamedou Moustapha Bâ, dans un contexte mauritanien marqué par la fragmentation des forces, l’épuisement du discours partisan traditionnel et le repli des consciences, s’inscrit dans cette rare lignée. Celle d’un homme seul, déterminé, armé non pas de soutiens occultes ou de privilèges hérités, mais d’une idée, d’une vision, d’un héritage moral profondément incarné.
Face aux appareils politiques usés, aux logiques de pouvoir qui broient les volontés indépendantes, il aurait été plus simple de se taire, de composer, voire de renoncer. Mais il a choisi le chemin de la verticalité, celui qui expose, qui isole parfois, mais qui élève.
Seul contre des puissances installées, souvent en butte à l’indifférence ou aux attaques souterraines, il a tenu bon. Son engagement pour une Mauritanie réconciliée, plurielle et solidaire s’est construit à contre-courant, loin des calculs immédiats, dans la rigueur d’une pensée politique profonde et dans la fidélité à un idéal de justice.
Cet idéal, il ne l’a pas inventé seul. Il le porte en héritage, celui d’un homme exceptionnel dont la disparition fut une blessure ouverte dans la conscience nationale : le président Kane Hamidou Baba. Pionnier de la cause des opprimés, figure tutélaire d’un vivre-ensemble jamais imposé mais toujours rêvé, Kane fut plus qu’un mentor : il fut un repère. Sa voix résonne encore dans les interstices du silence républicain, rappelant à chacun que la dignité humaine, la reconnaissance des identités et la fraternité sont les piliers d’une nation véritablement moderne.
Mais là où d’autres se seraient contentés de la nostalgie, Mohamedou Moustapha Bâ a décidé de prolonger l’œuvre. Il n’a pas fait de la mémoire un mausolée, mais un ferment d’action. À la tête de la Coalition Vivre Ensemble, et désormais à travers le PAREN VE (Parti de la Renaissance pour le Vivre Ensemble), il incarne ce que peu osent : une synthèse entre la fidélité à la mémoire de Kane et l’audace d’un avenir en construction. Il a repris le flambeau sans trahir la lumière. Il parle pour les oubliés, rassemble au-delà des appartenances, et ose un langage politique nouveau dans un pays qui en a tant besoin.
Son ascension rapide ne tient pas du miracle. Elle est le fruit d’une constance rigoureuse, d’un travail intellectuel profond, d’une parole rare mais juste, d’une éthique de l’engagement que même ses adversaires les plus coriaces peinent à nier. Là où beaucoup attendaient sa chute, il a surpris par sa résilience. Là où on tentait de le réduire à une voix solitaire, il est devenu l’écho de milliers. Il a franchi les seuils du doute pour s’imposer comme une conscience politique nationale.
Ce succès n’est donc pas une victoire individuelle. Il est le témoignage vivant que la Mauritanie peut encore produire des élites intègres, que l’opposition peut renaître dans la dignité, que l’horizon peut s’élargir pour une jeunesse avide de modèles authentiques. Il est aussi, et surtout, un appel silencieux mais ferme à bâtir un nouvel imaginaire politique mauritanien, débarrassé des réflexes de domination, des replis identitaires, des postures cyniques.
En définitive, ce n’est pas seulement un homme qui a réussi contre vents et marées. C’est une idée qui s’est imposée. Celle d’une Mauritanie capable d’honorer ses martyrs sans trahir leurs rêves, de promouvoir ses enfants sans effacer leur diversité, de faire de la solitude d’un homme un socle collectif pour une nation en quête de se réconcilier avec elle-même.
Abou Hamath Dia
Inspecteur de l’enseignement secondaire.